
Le sens de la vie est simplement d’être vivant. C’est si évident, si simple. Pourtant, tout le monde court dans une grande panique, comme s’il était nécessaire d’accomplir quelque chose au-delà de soi-même.
Avez-vous remarqué cette compulsion moderne particulière à être toujours hyperconnecté ? Toujours prêt, toujours réactif, toujours productif. Nous portons notre agitation comme un symbole de fierté. Nos agendas deviennent la preuve de notre importance. Nous nous sentons obligés d’être perpétuellement disponibles pour notre travail, nos appareils, les opinions des autres, le bavardage incessant de nos esprits agités. C’est comme un commerçant qui ne ferme jamais sa boutique. La porte reste ouverte, la cloche sonne sans cesse, et les clients, désirés ou non, défilent constamment.
Mais voici ce qui est curieux : nous avons oublié que nous ne sommes pas seulement le commerçant. Nous sommes aussi la marchandise, la caisse enregistreuse, le bâtiment lui-même et la rue sur laquelle il se trouve. Cette disponibilité à laquelle nous nous accrochons crée une anxiété particulière,
Mais voici ce qui est curieux : nous avons oublié que nous ne sommes pas seulement le commerçant. Nous sommes aussi la marchandise, la caisse enregistreuse, le bâtiment lui-même et la rue sur laquelle il se trouve. Cette disponibilité à laquelle nous nous accrochons crée une anxiété particulière, une fièvre légère de l’âme. Ce sentiment que nous devons répondre, réparer, gérer, contrôler. Nous devenons comme ces petits jouets mécaniques qui s’agitent avec une énergie folle, mais dans des directions aléatoires.
LA SURFACE AGITÉE DE L’EXISTENCE
Imaginez l’insecte qui patine frénétiquement à la surface d’un étang. La pauvre créature crée des ondulations infinies et croit faire bouger l’étang. Elle ne s’arrête jamais, pas un instant, pour plonger ne serait-ce qu’un centimètre sous la surface et découvrir les profondeurs calmes et fraîches qui la soutiennent depuis toujours. Notre agitation constante est cette disponibilité. Elle nous maintient à la surface, sans jamais goûter à la profondeur de l’être. Nous confondons nos ondulations avec la réalité elle-même.
Quelle est la conséquence de cette activité de surface ? La vie devient une série de réactions. Vous ne vivez plus votre vie. Vous en êtes devenu le secrétaire permanent, gérant frénétiquement les demandes entrantes. Vous confondez le menu avec le repas, l’agenda avec l’événement, la carte avec le territoire.
Quand avez-vous eu pour la dernière fois une conversation sans planifier votre réponse pendant que l’autre parlait ? Quand avez-vous mangé un repas sans lire, vérifier des messages ou penser à ce qui suit ? Quand avez-vous simplement été, sans ce sentiment lancinant que vous devriez faire autre chose ? C’est le dilemme moderne. Nous sommes si occupés à « faire » la vie que nous avons oublié comment la vivre. Nous sommes comme quelqu’un qui passe tant de temps à polir ses lunettes qu’il ne regarde jamais à travers elles.
WU WEI : L’ART DU NON – AGIR
Ce n’est pas une faute morale, ni une raison de culpabilité — la culpabilité n’est qu’une autre forme de disponibilité, offerte à un critique intérieur qui ne prend jamais de vacances. C’est simplement ce qui arrive quand nous prenons le doigt pointant la lune pour la lune elle-même. Le doigt, ici, est toute notre agitation. La lune est le simple fait d’exister, ce moment extraordinaire, unique, éternellement maintenant, dont nous nous sommes détournés, hypnotisés par notre propre mouvement. Nous sommes tombés dans une transe collective où nous croyons que notre valeur se mesure à notre réactivité, notre identité à notre disponibilité. C’est comme une radio qui scanne constamment les stations sans jamais s’arrêter assez longtemps sur une fréquence pour entendre la musique.
Tout ce que nous recevons, c’est du bruit statique et des fragments de mélodie, assez pour nous maintenir en recherche, mais jamais assez pour nous satisfaire. Plus nous nous rendons disponibles, moins nous sommes présents. Plus nous essayons d’être partout, moins nous sommes quelque part. Plus nous répondons à tout, moins nous entendons vraiment quoi que ce soit. C’est le grand paradoxe de notre époque. En essayant de nous connecter à tout, nous nous sommes déconnectés de ce qui compte le plus : cette expérience immédiate, intime, infiniment riche d’être vivant ici et maintenant.
L’ESPACE POUR L’ÉMERGENCE NATURELLE
Un fermier, si impatient de voir ses cultures pousser, sortit la nuit pour les tirer à la main. Il les tua toutes. La croissance se produit par non-interférence, en créant les bonnes conditions puis en s’écartant. Les changements les plus profonds dans nos vies arrivent non par notre effort forcé, mais par notre volonté de créer l’espace pour ce qui veut émerger naturellement. Le miroir vide est une belle image. Un miroir est totalement indisponible d’une certaine manière : il ne s’accroche pas à l’image d’une belle femme qui s’y reflète, ni ne résiste à celle d’un monstre effrayant. Il les accueille avec une impartialité parfaite et les laisse partir dès qu’ils passent. C’est précisément parce qu’il est indisponible au jugement qu’il est disponible à la clarté parfaite. Il ne commente pas ce qu’il reflète. Il reflète simplement.
Pouvez-vous être ainsi ? Refléter votre expérience sans immédiatement chercher à la réparer, l’améliorer ou y échapper ? Être indisponible au commentaire interne constant sur ce qui devrait ou ne devrait pas se passer ? C’est l’art du non-agir. Il ne s’agit pas de passivité ou d’indifférence, mais de découvrir la différence entre réagir et répondre. La réaction est automatique, mécanique, prévisible. La réponse émerge d’un lieu plus profond, de la tranquillité plutôt que de l’anxiété, de la présence plutôt que de l’habitude. Quand vous cessez d’être disponible aux schémas mécaniques de réaction, l’espace s’ouvre pour une réponse authentique, toujours fraîche, adaptée à la situation réelle plutôt qu’à vos idées sur elle.
LA DISPONIBILITÉ PARADOXALE
La plupart de notre disponibilité est en réalité une indisponibilité. Nous sommes si disponibles à nos pensées sur la vie que nous sommes indisponibles à la vie elle-même. Si disponibles à nos plans pour la conversation que nous sommes indisponibles à la personne à qui nous parlons. Si disponibles à notre agenda que nous sommes indisponibles au jour lui-même. La véritable disponibilité, celle qui sert vraiment la vie, vient d’une indisponibilité particulière : être indisponible à la voix dans votre tête qui commente, juge, prépare le prochain mouvement. C’est comme écouter de la musique : si vous pensez constamment à la musique, l’analysez, la comparez, vous n’écoutez pas vraiment. Pour entendre la musique, vous devez devenir indisponible à vos pensées sur elle et disponible à la musique elle-même.
Les Chinois parlent de « jeûne de l’esprit » : non priver l’esprit de nourriture, mais le laisser reposer de sa consommation constante de pensées, de soucis, de plans et de jugements. Quand l’esprit jeûne ainsi, quelque chose d’extraordinaire se produit. Vous découvrez que vous n’êtes pas le gestionnaire désespéré que vous pensiez être, ni le contrôleur anxieux essayant de tout faire fonctionner selon vos préférences. Quand vous cessez d’être l’acteur frénétique sur scène, essayant de se souvenir de ses répliques, de toucher ses marques et de plaire au public, quelque chose de miraculeux arrive. Vous devenez le spectateur. Vous vous asseyez, non en retrait ou détachement, mais en émerveillement, et vous regardez la pièce la plus étonnante se dérouler. Et cette pièce, vous réalisez progressivement, est votre propre vie, vue avec des yeux neufs, comme pour la première fois.
LA JOIE DE L’EXISTENCE
L’anxiété de la performance s’évanouit. Vous devenez disponible à l’émerveillement, à l’improbabilité même de l’existence. Disponible à ce que les mystiques ont toujours su : la vie ordinaire, vue clairement, est absolument extraordinaire. Quand vous cessez d’être disponible comme gestionnaire de votre vie, vous avez la chance de découvrir qui est vraiment le propriétaire de l’usine. Vous trouvez que votre soi fondamental n’est pas l’agité que vous pensiez, mais quelque chose de bien plus vaste, plus mystérieux. Vous êtes cette chose immense que vous voyez au loin avec de grands télescopes. Vous n’êtes pas le petit soi séparé patinant frénétiquement à la surface de l’étang. Vous êtes l’étang lui-même.
Ce n’est pas une métaphore, ni une croyance réconfortante, ni une position philosophique. C’est ce que vous découvrez quand le bruit de la disponibilité constante s’apaise enfin pour laisser entendre le signal plus profond. Quand cette reconnaissance émerge, même brièvement, tout change de la manière la plus délicieuse. Les embouteillages, les plans annulés, les commentaires critiques, les retards imprévus ne sont plus des interruptions à votre histoire. Ils deviennent l’histoire, des phénomènes fascinants de la nature, aussi impersonnels et intéressants que des orages ou des feuilles qui tombent.
L’ORDINAIRE EXTRAORDINAIRE
Vous réalisez qu’ils ne dérangeaient que le « vous » disponible pour être dérangé, un personnage fictif que vous jouiez si convaincant que vous aviez oublié que c’était un rôle. Quand ce personnage salue et quitte la scène, que reste-t-il ? Pas rien. Tout. Cette présence immédiate, intime, infinie que vous avez toujours été, mais que vous aviez négligée dans votre agitation. C’est comme ces illusions optiques où vous cherchez l’image cachée, vous forcez, et soudain vous vous détendez : elle est là depuis le début.
La vie devient ainsi quand vous cessez d’être disponible pour celui qui doit tout comprendre. L’image cachée de l’existence se révèle, et vous réalisez qu’elle n’était jamais cachée. Vous regardiez simplement de la mauvaise manière. Le monde cesse d’être votre adversaire et devient votre partenaire de danse. Les événements cessent de vous arriver et commencent à se produire avec vous. Les frontières entre le danseur et la danse, l’observateur et l’observé, le vivant et la vie se dissolvent de la manière la plus naturelle.
LA SINCÉRITÉ DE LA SPONTANÉITÉ
Cette reconnaissance ne vous sépare pas de la vie ordinaire. Elle la transforme en quelque chose d’extraordinaire. Laver la vaisselle devient une méditation. Être dans les embouteillages devient un concert de rythmes urbains. Les conversations deviennent des danses improvisées. Vos pensées et émotions deviennent comme des motifs météorologiques : intéressants, changeants, pas particulièrement personnels. Vous vous trouvez dans une conspiration bienveillante où tout semble coopérer de manières ingénieuses et harmonieuses. Non parce que vous l’avez imposé à la réalité, mais parce que vous avez cessé d’imposer une vue quelconque.
PRATIQUE DU NON-AGIR
Commencez petit : cinq minutes seulement. Cessez d’être disponible à vos propres pensées. Ne les arrêtez pas — cela serait comme essayer d’arrêter le vent avec un mur. Laissez-les bavarder dans la salle de conférence voisine pendant que vous sortez prendre un café. Écoutez les oiseaux, la circulation, le son de votre respiration. Ce n’est pas plus important que vos pensées, mais pas moins non plus. Et cela se passe maintenant, pas dans le passé rappelé ou le futur imaginé. C’est la méditation, pas la version compliquée avec coussins spéciaux et schémas respiratoires. Juste sortir de la réunion de vos pensées et remarquer ce qui se passe d’autre.
Apportez cette qualité à votre disponibilité externe. Ne dites pas oui immédiatement à chaque demande. Créez un petit espace entre le stimulus et votre réponse. Laissez le téléphone sonner trois fois. Prenez une vraie respiration avant de plonger dans la conversation. Permettez un moment de silence au lieu de combler chaque vide. Vous n’êtes pas impoli. Vous créez l’espace pour qu’une réponse authentique émerge des profondeurs plutôt qu’une réaction automatique de la surface. C’est ainsi que vous ajustez la voile pour capter le vent du Wu Wei.
LA JOIE DISPONIBLE
Quand vous cessez d’être disponible pour le superficiel, vous devenez totalement disponible pour le profond. Disponible à ce moment. Au son de ma voix atteignant vos oreilles maintenant. Au sentiment de l’air entrant et sortant de vos poumons. Au fait mystérieux qu’il y ait quelque chose plutôt que rien. Quand vous ne chassez plus l’extraordinaire, l’ordinaire se révèle extraordinaire. C’est le grand changement, le retour à la maison. Vous découvrez que vous n’étiez jamais parti. Les embouteillages deviennent une méditation sur la patience. L’enfant qui pleure devient un enseignement sur la présence inconditionnelle. La tâche ennuyeuse devient une prière d’attention simple.
Non parce que vous vous êtes convaincu que ces choses sont profondes, mais parce que vous avez cessé de vous convaincre qu’elles ne le sont pas. C’est ce qui arrive quand le patineur plonge enfin un centimètre sous la surface. Il ne se noie pas. Il découvre qu’il a toujours été soutenu par quelque chose d’infiniment plus fiable que son agitation frénétique. Vous découvrez que vous n’avez pas à maintenir la vie ensemble. La vie se maintient magnifiquement. Et la vie vous inclut, non comme son gestionnaire anxieux, mais comme l’une de ses expressions les plus merveilleuses. Quel soulagement extraordinaire de découvrir que l’univers n’a pas besoin de votre supervision constante. Que le soleil se lève sans votre aide. Que votre cœur bat sans votre permission. Que les saisons changent, les marées tournent, et la Terre continue de tourner dans l’espace, en ordre parfait. Tout cela sans requérir votre disponibilité.
Dans ce soulagement, quelque chose d’autre devient disponible : la joie. Pas la joie dépendante des circonstances, mais la joie qui est la circonstance, la joie improbable de l’existence elle-même. L’émerveillement devient disponible. L’amour devient disponible, comme la reconnaissance qu’il ne se passe ici qu’une seule et même chose, s’exprimant en multiples, jouant à cache-cache avec elle-même de manières ingénieuses. Et le plus beau : vous devenez disponible aux autres d’une manière nouvelle. Non comme quelqu’un qui a besoin d’eux ou quelque chose à prouver, mais comme l’espace où ils peuvent découvrir ce qu’ils ont toujours été, mais peut-être temporairement oublié.
Merci de ne pas avoir été disponible à tout ce qui aurait pu vous empêcher d’entendre cela. Et merci d’avoir été disponible pour reconnaître, ne serait-ce qu’un instant, la nature extraordinaire de ce moment très ordinaire. Et maintenant, après tous ces mots sur l’indisponibilité, la chose la plus authentique que vous puissiez faire est de cesser d’être disponible aux mots et de simplement être. Juste être. Le reste s’occupera de lui-même. Il l’a toujours fait.

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